Actuel – 28.09.2016

« Un tsunami » sur la presse régionale

La réduction des rédactions est-elle inéluctable? Revue d’opinions à propos des mesures annoncées dans les deux principaux quotidiens régionaux romands (16 personnes licenciées à 24 heures, huit à la Tribune de Genève, sept autres postes supprimés)». Par Sylvain Bolt.

Dans un long éditorial intitulé «Le défi d’une presse de qualité», le rédacteur en chef de la Tribune de Genève, rappelle «que le journal (…), le plus important de notre région, joue un rôle clé dans le fonctionnement démocratique de notre canton, de notre pays et de nos institutions». Pierre Ruetschi admet que «les économies que nous sommes contraints d’effectuer aujourd’hui, aussi regrettables soient-elles à tous égards, ne mettent en péril ni la qualité de l’information ni bien sûr l’existence de la Tribune de Genève. Au contraire, la démarche que nous avons entamée est nécessaire pour assurer la pérennité de ce quotidien.»

Toujours dans la Tribune de Genève, les collaborateurs se montrent plus pessimistes et s’insurgent contre ces coupes. «Le personnel vous doit la vérité. Votre quotidien ne sortira pas indemne des mesures d’économie drastiques que son propriétaire (…) veut lui imposer. (…) Un véritable tsunami vient de frapper la pression régionale. Ce ne sera pas sans conséquence sur le contenu de vos journaux. (…) Nous osons espérer que les Genevois et les Vaudois sauront ramener les dirigeants de Tamedia à davantage de raison.»

« Une stimulation à innover »

Dans les colonnes de 24 heures, son rédacteur en chef déplore «qu’en dix ans, le chiffre d’affaires de +24 heures+ a été divisé par deux.» Thierry Meyer se veut un minimum positif et évoque l’obligation «de repenser notre organisation interne et nos choix éditoriaux » et « une stimulation à innover, à se montrer créatif, à trouver des solutions intelligentes, à dégager des priorités.»

Il termine en faisant appel aux lecteurs du quotidien vaudois. «Dans cet effort, vous avez un rôle important à jouer. Votre attachement à une presse ambitieuse, attentive à son rôle civique, lieu du débat démocratique et de l’échange d’idées, qui fédère depuis plus de deux siècles et demi l’ensemble de nos régions, est cardinal».

«En 2019, les journaux représenteront moins de 10% du marché des médias en Suisse.»

Ailleurs en Romandie, le Nouvelliste titre des «journalistes à la rue», en référence aux 200 personnes qui ont manifesté leur soutien à Genève devant la «TdG» et aux 150 personnes qui ont défilé dans les rues de Lausanne en soutien au 24 heures. Le gratuit 20 minutes évoque dans son édition du jour «des élus inquiets des coupes dans la presse lémanique» et la lettre que les Conseils d’Etat des deux cantons ont envoyé au conseil d’administration de l’éditeur zurichois.

Dans le Le Temps, on apprend qu’une fusion entre les deux principaux titres lémaniques est exclue mais que «les synergies, qui sont déjà importantes entre les deux titres pourraient encore être développées». Dans un autre papier, le quotidien romand évoque les résultats de Tamedia, qui doit son bon chiffre d’affaires à toutes les offres numériques n’ayant pas un caractère journalistique. Et l’article de citer une étude affirmant qu’en 2019, «les journaux représenteront moins de 10% du marché des médias en Suisse».

En Suisse alémanique, la NZZ cite quant à elle des propos peu réjouissants du président de Tamedia, Pietro Supino. «Le pire est à venir. Quand je dors mal la nuit, je me demande combien de places de travail existeront encore dans dix ans dans les médias et dans notre pays.» Le quotidien zurichois évoque également le bénéfice de 334 millions réalisé par le groupe Tamedia en 2015 et le revenu de 6 millions empoché par son CEO, que dénoncent les protestataires. «Une redistribution des gains en faveur de la rédaction, comme l’exigent les protestataires, ne peut éviter les problèmes structurels qu’à court ou moyen terme», conclut le journaliste de la NZZ.

Sylvain Bolt

Sylvain Bolt

Journaliste Web pour Edito.ch/fr. Diplômé de l'Académie du journalisme et des médias de l'Université de Neuchâtel.

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