Actuel – 05.05.2017

Aides publiques à la presse? Le débat au Salon du livre

A l’initiative de «Médias pour tous», deux débats sur l’avenir de la presse ont eu lieu dans le cadre du salon du livre, les 28 et 29 avril dernier à Genève. Retour sur les prises de position du débat de samedi intitulé «Quels soutiens aux médias des élus politiques en Suisse romande?».

L’aide à la presse 

Philippe Nantermod (conseiller national PLR): « Les médias doivent d’abord repenser leur fonctionnement, sous certains angles ils sont dépassés. »

Pierre Maudet (Conseiller d’état, GE): les exécutifs romands sont «empruntés» en raison de la question de la liberté de la presse. «Par définition, une aide directe tue son indépendance». Mais l’article 28 de la constitution genevoise donne mandat aux autorités de soutenir la qualité de l’information.

Alice Glauser (conseillère nationale UDC): pour son parti, les aides directes ne sont « pas envisageables ».

Pour Adèle Thorens (conseillère nationale verte): «La SSR ne peut pas assumer seule la fonction d’information. L’indépendance n’est pas le rachat de la presse par des milliardaires qui ont une orientation politique. C’est le rôle des collectivités publiques d’assurer des médias diversifiés et indépendants.»

Roger Nordmann (conseiller national socialiste): « Oui, évidemment qu’il faut accroître l’aide. C’est un hasard historique que la publicité ait financé la presse pendant 150 ans. Il n’y aura plus de presse indépendante sans aide. Je propose de lier le soutien à l’achat, proportionné au prix de vente».

Gilles Marchand (directeur désigné de la SSR): il faut «trouver des mécanismes de coexistence des médias. Plutôt des aides indirectes car les aides directes mettent surtout en cause l’indépendance entrepreneuriale.»

Sur le projet FIJOU (de Médias pour tous: création d’une interface pour le financement du journalisme)

Philippe Nantermod: «Non, pas en l’état. C’est l’argent des lecteurs! Si je ne suis pas content d’un journal, je me désabonne.»

Roger Nordmann : «Oui à FIJOU, mais ce devrait être fédéral.»

Gilles Marchand: «FIJOU est un modèle subtil, si ça permet à des titres de cohabiter avec le service public, tant mieux. »

Pierre Maudet: «Oui, mais… Faut-il aider l’information au sens large ou seulement le journalisme? S’il s’agit de soutenir une information de qualité, on peut donner des impulsions. FIJOU ne peut être un oreiller de paresse, ce ne serait qu’une solution de transition.»

Alice Glauser: «Pourquoi pas? Il faut en effet faire quelque chose pour les médias romands, on est trop petit.»

Adèle Thorens: «Oui, car ce projet vient des journalistes. C’est un signal fort. On ne subventionnerait pas une ligne éditoriale, mais une infrastructure médiatique qui est la base de notre démocratie. Les prestations de service public vont au-delà de la SSR.»

Philippe Nantermod: «Les médias ont joué un rôle immense dans leur perte en mettant leurs contenus en ligne gratuitement. Ils ne sont plus en adéquation avec leurs lecteurs. Je ne suis pas d’accord de dépenser pour maintenir un modèle dépassé. Mais plus tard peut-être, parce qu’il est vrai qu’il y a une part de service public dans la presse.»

No Billag (initiative supprimant la redevance et interdisant toute aide publique aux médias).

Gilles Marchand: «Le contre-projet serait plus pernicieux. Il y a beaucoup d’inconnues, ce qui rend notre situation délicate».

Roger Nordmann: «Le contre-projet serait mortel pour la Suisse romande, nous allons le combattre!»

Philippe Nantermod (membre du comité d’initiative): «Les arguments contre No Billag sont fallacieux. L’initiative propose seulement de supprimer la redevance pour tous. On doit payer selon son utilisation. Chacun a le droit fondamental de choisir les médias qu’il veut soutenir.»

Gilles Marchand: «L’initiative dit que la Confédération ne peut plus imposer de redevance ou subventionner une activité médiatique. On va vers le pay per view.»

Roger Nordmann: «Réduire le citoyen à un consommateur de ce qui lui plaît est une ânerie qui me choque.»

Tous les intervenants ont approuvé l’idée d’harmoniser la TVA. Pierre Maudet a montré son inquiétude par rapport à la SSR et «le risque de remplacer un système qui fonctionne par un saut dans le vide. No Billag nous divertit du vrai sujet, c’est une perte de temps.» Selon Gilles Marchand, «pendant qu’on se dispute les miettes, d’autres mangent le gâteau. L’important est de pouvoir continuer à rassembler le public». Adèle Thorens a elle affirmé que «si vous êtes pour la liberté, vous devez soutenir le service public. Je sais pas comment les Suisses pourront continuer à s’informer et à voter si vous saccagez la radio-TV en plus de la presse.»

Sylvain Bolt

Sylvain Bolt

Journaliste Web pour Edito.ch/fr. Diplômé de l'Académie du journalisme et des médias de l'Université de Neuchâtel.

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