Actuel – 17.03.2022

Des ondes cantonalisées ?

Une nouvelle guerre des ondes fait rage en Suisse. Faut-il adopter à l’avenir pour les radios et les TV locales des zones de desserte à l’échelle cantonale ou régionale ? Une réponse est attendue cet automne.

Par Alain Meyer

A quoi ressembleront les zones de desserte des radios et TV locales en Suisse demain ? Se dirige-ton vers un redécoupage cantonal et non plus régional ? Après avoir recueillis près de 200 avis sur le projet de révision partielle de l’ordonnance fédérale sur la radio-TV (ORTV), le Conseil fédéral divulguera sa version définitive cet automne. Ensuite la mise au concours des nouvelles concessions sera lancée, avant leur octroi au début 2025 selon l’Office fédéral de la communication (OFCOM).

Vision étriquée. Mais des directions de chaînes s’insurgent déjà contre le fait de devoir limiter à l’avenir ces arrosages à un seul canton. Selon elles, c’est associer vue de l’esprit et stratégie étriquée. Dans l’Arc jurassien, où les deux groupes multimédias BNJ et Gassmann se partagent l’essentiel des ondes, cette perception ne correspond ni à la réalité du terrain ni au besoin de créer des ponts entre le canton de Neuchâtel, le Jura, le Jura bernois et la Bienne francophone. Ici, il s’agit de defendre « le caractère multi­polaire d’une région supracantonale » en proposant un ­modèle économiquement viable pour les radio/télévisions locales. Un argument qui peut faire mouche après le non au ­paquet d’aide aux médias le 13 février.

Concession unique. Consulté dans le cadre de cette révision, le Réseau des villes de l’Arc jurassien (RVAJ) craint également comme la peste ce rebond de cantonalisme. Défendant les intérêts d’une zone englobant jusqu’aux villes et communes vaudoises d’Yverdon, Orbe et Sainte-Croix, le RVAJ juge qu’un tel redécoupage ne tiendrait pas compte « des particularités politiques, culturelles et linguistiques » de l’Arc jurassien. Miser sur une cantona­lisation, c’est risquer « une dilution de cette unité », brandit-il.

Concrètement, il réclame le maintien du Jura bernois et de la ville d’Yverdon dans l’offre de la chaîne de TV Canal Alpha basée à Cortaillod, près de Neuchâtel. Fort du soutien de treize villes, le RVAJ qualifie d’« indispensable » l’obtention d’une concession unique entre Neuchâtel et le Jura pour diffuser « des programmes multiples ». Les radios RTN à Neuchâtel, RFJ (Radio Fréquence Jura) à Delémont et RJB (Radio Jura Bernois) à Tavannes travaillent déjà sous le chapeau du groupe BNJ.

Pourquoi donc changer un système qui garantit « une offre variée et de qualité » qui, en ces temps de vaches maigres, permet de réaliser des économies « dans les domaines transversaux et de back office », dit-on à Delémont. Il est demandé qu’un statu quo+ soit appliqué avec une seule concession accordée pour Bienne et le Jura bernois aux entreprises de médias Gassmann à Bienne et BNJ à Rossemaison (Jura). Une autre concession radio pourrait couvrir les cantons du Jura et Neuchâtel, en plus du ­maintien du mandat de la TV Canal Alpha.

« Elle couvre une zone géographique très large et cela aurait un impact négatif sur la qualité de vie des habitants. »

« Interdépendances ». En Suisse alémanique aussi, le projet de révision partielle de l’ORTV ne satisfait guère. L’Argovie se fait sérieusement du souci pour la station privée Radio Argovia. Une zone de diffusion plus limitée équivaudrait pour elle à un marché publicitaire plus restreint.

Également consultées, les autorités argoviennes argumentent que les liens dépassent ici largement les bornes cantonales. Il est question « d’interdépendances » dans la région du Limmattal ou du Fricktal, avancent-elles. Une réduction des zones ou une limitation à des territoires cantonaux reviendrait, selon elles, à « un affaiblissement des possibilités de communication et d’informations transfrontalières ». C’est ce qu’elles ont pointé à l’OFCOM. L’idée de réduire ces zones inquiète à ­Zurich aussi. Notamment pour la chaîne associative Radio Stadtfilter de Winterthour. « Elle couvre une zone géographique très large et cela aurait un impact négatif sur la qualité de vie des habitantes », notent ici les autorités.

L’abaissement de la taille des régions arrosées ne passe pas non plus très bien auprès des autorités de Bâle-Ville. Comme en Argovie, on redoute que la région du Fricktal soit là encore la grande oubliée de la zone de concession pour la région Nord-Ouest.

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