Portraits du paysage – 08.03.2016

Elémentaire, la visite chez Watson

Entrer chez Watson, c’est pousser la porte d’une rédaction colorée située dans un quartier innovant de Zürich.

Dès le hall d’entrée, on retrouve ce rose qui domine les locaux autant que le site de l’un des rares pure players helvétiques.

Dans une newsroom moderne, la soixantaine de collaborateurs se répartit comme dans une rédaction « normale ». L’espace est totalement ouvert, et les rangées de bureau impressionnent. On sent que la répartition est stratégique. Par rubrique, mais pas seulement.

Comme me l’explique Viktoria Weber, qui s’occupe de ma visite ce jour-là : « à gauche de la newsroom, les filles, à droite, les garçons ». Et cette séparation correspond étrangement à celle des « hard news » et des « soft news ». Comprenez par là les « rubriques sérieuses » et celles qui le sont moins. Les hommes s’occupent des sujets économiques, politiques et sportifs. Les femmes travaillent sur des sujets plus légers, des histoires pour la rubrique société. Il ne faudrait pas tomber dans le cliché non plus, mais la répartition est tout de même frappante.

Alors, travailler chez Watson, une bonne ou une mauvaise aubaine?

En prenant la température directement sur place, l’expérience semble plutôt attirante. Mais quand même. Ce sont des journalistes web. Et uniquement web. Le débat très actuel de la disparition du papier surgit alors. Les journalistes web sont-ils des vrais journalistes ? se demanderont les puristes, ceux de la « vieille école ».

Une ligne éditoriale assumée

Une ligne éditoriale assumée

 

Les locaux et l’équipe de Watson invitent à se réconcilier avec le journalisme web. En discutant avec les collaborateurs, en les voyant à l’œuvre, je réalise qu’ils accomplissent des tâches relativement similaires à celles de journalistes de médias « classiques ». Certains ont même le luxe de sortir de la rédaction. Pour des articles de reportage. Pour lesquels ils ont le temps de travailler. Et parce que la rédaction en chef mise sur la rencontre avec les gens, les histoires à raconter.

Après deux ans d’activité, le bilan semble bon pour Watson. Les visites progressent, la notoriété s’étend. Même si le média cherche encore sa voie. L’adaptation de sa ligne éditoriale est permanente, autant pour le fond que pour la forme. « Le site permet une liberté énorme, mais il est plus compliqué de trouver la formule idéale à long terme. Nous modifions sans arrêt les choses, sans que les lecteurs ne s’en rendent forcément compte », raconte Viktoria Weber.

Si certains articles marchent très forts, ce sont régulièrement ceux qui ont le plus faible « contenu informatif ». En d’autres termes, ce qui rapporte du clic, ce sont les chats qui font du skateboard, bref les histoires insolites et quelque peu loufoques. Et quand un média propose ses contenus gratuitement et dépend de ses annonceurs, difficile de ne pas céder au diktat des clics et de ne pas finir par rédiger plus que ce genre d’articles. Faut-il s’adapter à ce qui plaît, et tomber dans du « journalisme à la demande » ou résister à tout prix en gardant la main sur le choix des articles ? Ce qui est de l’information et ce qui ne l’est pas a-t-il, peut-il changer selon des nouvelles habitudes de consommation ? C’est ce que le journalisme à la Watson suscite comme interrogations.

Mais bien vite à la rédaction, on tente de me rassurer. Toutes les personnes rencontrées me le répètent : Watson, c’est différent. Watson va plus loin. Beaucoup de faits divers simplement « balancés » sur la toile ne sont pas repris par le pure player, qui préfère contextualiser et apporter un regard original sur une information.

Retrouvez dans le prochain numéro d’Edito un article sur Watson…

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