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Actuel – 27.10.2016

Les « ad blockers », aussi utiles que néfastes

Les bloqueurs de pubs, «ad blockers», sont l’ennemi public numéro un des journaux. Ceux-ci usent de tous les stratagèmes pour se débarrasser de ces logiciels qui suppriment les publicités onlines et les rentrées financières qui les accompagnent. Mais l’utilité des bloqueurs de pub n’est pourtant pas négligeable. Par Sylvain Bolt.

La plupart des journaux luttent contre le fléau des bloqueurs de pubs en interdisant tout simplement l’accès à leur contenu aux utilisateurs de ces logiciels. Ils en sont arrivés à ce stade après avoir pourtant tenté des manœuvres moins coercitives. C’est le cas du quotidien «Le Monde» qui, après avoir constaté que 20% de ses lecteurs utilisaient des «ad blockers», a tenté de les en dissuader avec des messages. De la photo du rédacteur en chef expliquant le modèle publicitaire du journal «Le Monde» à un message plus profond, rappelant le nombre de journalistes dans la rédaction et le coût pour garder un journalisme de qualité avec l’aide d’un dessin-animé.

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Le «Financial Times» a lui aussi tenté l’expérience de la dissuasion, avant la répression. Avec succès, puisque 40% des utilisateurs ont désactivé leur logiciel bloqueur de pub après un message de sensibilisation sur la signification de la pub pour le financement de leur journal. Mais la situation ne peut pas durer comme cela éternellement. «On se lamente sur les +ad blockers+, mais nous ne changeons pas notre politique publicitaire pour autant», affirme Pierre Buffet, responsable des études numériques au journal «Le Monde» sur digiday. «Si nous ne procédons pas à un changement majeur sur notre site web et cherchons les causes profondes du problème, nous perdrons», rajoute-t-il. Une explication vient peut-être du fait que les «ad blockers», bien qu’ils privent les médias d’une somme énorme de revenus publicitaires, sont le garant d’une meilleure sécurité pour les utilisateurs qui les ont téléchargés.

Les « ad blockers » ne servent pas seulement à bloquer la pub

Une étude révèle que les «malware» ou «logiciels malveillants», ont triplé entre juin et février 2015. Ils contaminent les ordinateurs des lecteurs de journaux en ligne depuis des années, mais leur prolifération peut être enrayée par l’installation de bloqueurs de pubs. Et là est tout le paradoxe, renforcé par le fait que les «ad blockers» permettent parfois de réduire de moitié le temps de téléchargement, tout en baissant le nombre de données utilisées et en augmentant la durée de vie de batterie des smartphones.

«Quand est-ce que les directeurs de journaux vont-ils réaliser que les utilisateurs des +ad blockers+ ne s’en servent pas seulement pour bloquer la pub?», questionne Trevor Timm, directeur de l’organisation «Freedom of the Press Foundation» dans la Columbia Journalism Review. Avant d’aller devant les tribunaux – c’est le cas notamment de plusieurs éditeurs allemands qui veulent attaquer le « géant » Adblock Plus – la question mérite peut-être davantage de réflexions. La solution vient-elle de nouveaux formats de pubs? Certains éditeurs français veulent en tout cas tenter d’élaborer un environnement de publicités onlines plus agréable à la lecture, en veillant à ne pas déranger la navigation de leurs lecteurs. Affaire à suivre.

Sylvain Bolt

Sylvain Bolt

Journaliste Web pour Edito.ch/fr. Diplômé de l'Académie du journalisme et des médias de l'Université de Neuchâtel.

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