Portraits du paysage – 25.03.2018

Lièvres et tortues des médias

C’est un mercredi froid, il y a quelques semaines, dans cet hiver qui ne semble jamais vouloir finir. Un mercredi marqué par un événement important pour les journalistes valaisans : Doris Leuthard est de passage à Sion. Les médias ont été convoqués la veille, comme pour donner un peu de mystère au planning de nos ministres. Il faut donc y aller, sans l’ombre d’un doute. Point presse convoqué en début d’après-midi. Invitation on ne peut plus sommaire. Visite de travail, beaucoup de dossiers abordés. Stop. Soyez présents et c’est tout, stop.

Et le lendemain, bingo ! Les journalistes se sont arrangés pour être là, sans broncher. Ils écoutent ce qu’on n’a pas à leur dire, sans broncher. Ils savent que Doris Leuthard n’aura pas le temps, qu’elle devra filer ensuite. Une fois les prises de parole officielles terminées, je vis le premier « assaut journalistique » de ma carrière. Les journalistes s’agglutinent automatiquement par langue, allemand et français. En rond, prêts à poser les mêmes questions et à enregistrer les mêmes réponses, on joue des coudes, mais toujours en s’excusant. Trois minutes par groupe qui passent très vite, avant que Mme Leuthard ne doive mettre un terme aux interviews.

Une fois la bataille finie, la guerre n’est pas terminée. Alors que la conseillère fédérale s’apprête à repartir, elle est interpellée par une dernière journaliste. Une jeune femme restée en retrait, hors de la « meute », et qui observe attentivement. C’est une journaliste d’Immersions, nouvelle revue lancée il y plus d’un an. Tranquillement elle a laissé passer la foule pour aborder Doris Leuthard, tranquillement pour ne l’avoir rien que pour elle. La journaliste n’a pas d’article à rendre pour le lendemain. Elle est ici pour prendre contact, et aussi un peu pour satisfaire sa curiosité. Son attitude patiente est à l’image de la publication : slow. Et beaucoup plus classieuse. Sa position en retrait me donne à réfléchir. Je me sens poussée à les regarder, ces deux femmes, et à m’arrêter.

Un paysage médiatique fait uniquement de « slow journalism » ne serait, certes, pas viable. Des informations « urgentes » manqueraient, sans nul doute. Mais le rythme des médias quotidiens, d’actus donne également à réfléchir. La course à l’info est-elle toujours à ce point nécessaire ? Faut-il toujours sprinter, ou une allure de marathon suffirait-elle ? A ne plus vraiment savoir après quoi on court…

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