Actuel – 31.08.2013

Presse alémanique, un été au calme trompeur

L’été a été caractérisé par un calme trompeur dans le paysage médiatique suisse alémanique.

PAR PHILIPP CUENI ET CHRISTIAN CAMPICHE

Certes il n’y a pas eu à proprement parler de big bang, la presse a vécu de pires moments. Mais cette pause relative ne doit pas occulter des signes de changements très perceptibles.

Prenez la «Thurgauer Zeitung» qui appartient au groupe NZZ. Ce journal qui reprend du «St. Galler Tagblatt» ses pages Suisse, Etranger et Culture ferme son bureau de Kreuzlingen et réduit de 500 à 600 pour cent le temps global de travail de son effectif. Son offre quotidienne se réduira de cinq pages. Le groupe escompte des économies à hauteur d’un demi-million de francs. Bien sûr il ajoute les sempiternelles garanties: la rédaction était pléthorique, la qualité ne devrait pas souffrir. A se demander dans ces conditions pourquoi le journal n’était pas parvenu plus tôt à un tel constat. Une chose est sûre, la tendance est au délestage.

Landbote à Tamedia. Prenez encore le «Landbote». Presque bicentenaire, ce quotidien a porté longtemps fièrement l’étendard de la région de Winterthour face à sa puissante voisine Zurich. Ce rôle d’ambassadeur s’achève aujourd’hui, alors qu’a été annoncé, le 27 août 2013, son rachat par Tamedia. Le «Landbote» gardera une identité régionale dans ses pages ad hoc mais devra partager la plupart de ses rubriques avec d’autres titres de Tamedia.

Ce nouveau coup porté à la diversité de la presse en Suisse désole mais ne surprend personne dans la mesure où Tamedia détenait déjà 20% du capital du Landbote et disposait d’un droit de préemption. Il inflige également un cinglant démenti aux déclarations des dirigeants de Tamedia qui assuraient en 2011 vouloir se contenter de la participation de 20% afin de laisser toute son indépendance au «Landbote». Alors PDG de Tamedia, Martin Kall affirmait dans «Edito+Klartext» qu’il n’était pas dans l’objectif du groupe zurichois de racheter toute la presse helvétique. Deux ans et demi plus tard, ces propos sonnent bien creux.

NZZ revigorée. Prenez enfin la «Südostschweiz» en Suisse orientale. Bizarrement, les titres un temps reliés sous le toit commun du groupe de l’éditeur Hans-Peter Lebrument ont divorcé pour se placer sous la coupe de la NZZ. Ces journaux sont la « Werdenberger & Obertoggenburger », le « Bote der Urschweiz », le « Liechtensteiner Vaterland » et la « Rheintalische Volkszeitung ». Soit un tirage total d’environ 35.000 qui fait désormais défaut à la «Südostschweiz» (tirage révisé à la baisse: 82.000).

Dans le journal en ligne «persoenlich.com», Andreas Masüger, PDG de la «Südostschweiz», tente un déchiffrage de la situation. Pour lui, la NZZ a appâté le «Bote der Urschweiz» en lui faisant miroiter une collaboration avec la «Neue Schwyzer Zeitung », un journal concurrent qui gravite déjà dans son giron. Comme les trois autres titres renfloués. L’extrapolation va de soi: pour la ««Südostschweiz», les recettes publicitaire fondent comme neige au soleil. La conclusion aussi: au déclin de la ««Südostschweiz» répond une NZZ revigorée.

Ces manoeuvres en sourdine s’effectuent parallèlement à la cure d’amaigrissement que Tamedia fait subir à sa «Sonntagszeitung» où a été mis sur rails un train de 4,5 millions d’économies à moyen terme. Le rédacteur en chef, qui a annoncé sa démission pour d’autres raisons, a jeté de l’huile sur le feu dans une interview accordée à «persoenlich.com». Il juge «erronée» la décision de sabrer dans les effectifs rédactionnels, un thème qui a donné lieu à des «discussions difficiles entre moi et la direction». Bref le grand Tamedia demeure sur la pente du repli.

Blocher toujours. On ne peut en dire autant de Christoph Blocher qui a fait son «coming-out» rhénan en confirmant la reprise de 20 pour cent des actions de la «Basler Zeitung». L’opération, qui permet au tribun zurichois d’entrer au conseil d’administration du quotidien bâlois, s’est opérée par l’entremise de la société Medienvielfalt Holding (MVH) de Tito Tettamanti, laquelle détenait jusqu’ici 100% du capital. Les 20% acquis par Blocher l’ont été en fait directement par son antenne financière zurichoise Robinvest AG. Pour cela Robinvest a repris des prêts à hauteur de 40 millions de francs autrefois accordés à la BaZ par MVH.

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