M comme Marc-Henri Jobin – 22.02.2018

Question de moral(e)

En ce début 2018, le paysage médiatique fait peine à voir. Le dernier classement des «Clés de la presse» nous apprend que le poids des éditeurs français est passé de 12 à 6 milliards d’euros en moins de 15 ans. On sait que l’évolution est identique en Suisse. A la différence qu’ici, les journalistes, entre pression économique et débat sur la redevance, donnent l’impression de devoir travailler tous avec un pistolet sur la tempe.

2018, l’année de tous les dangers? Oui, si la roulette russe de la prochaine coupe budgétaire ou de la refonte annoncée conduit à ne plus proposer qu’un journalisme déprimé, résigné, mortifère. Non, si on réalise que la bascule numérique offre aussi de «nouveaux possibles», des terreaux où réinventer les médias et revivifier la profession.

Pour cela, il faut un projet, une perspective. Plusieurs médias sont sur cette voie. Ils effacent par leurs tentatives et leurs premiers succès la déprime ambiante. Et ils donnent envie: envie aux journalistes et aux jeunes explorateurs de nouvelles narrations de s’investir pour eux, envie au public de les suivre et de payer pour le faire.

En France, le site lemonde.fr est aujourd’hui l’activité la plus rentable du groupe. Il «dégage plus de 18 millions d’euros» et compte «160’000 abonnés purement numériques contre 25’000 en 2010», assure son président Louis Dreyfus dans une récente interview.

Poussé par sa diversification dans le numérique et l’événementiel, le groupe Figaro est devenu le 2e plus grand éditeur de l’Hexagone. Une stratégie d’autant plus intéressante qu’elle soigne aussi son titre phare Le Figaro qui, pris isolément, est pourtant «un foyer de pertes». Pourquoi? Parce que «le financement de la rédaction s’apparente à un investissement dans la marque, sans laquelle le développement de l’ensemble des activités, en ligne ou hors-ligne, serait plus limité», explique l’expert Jean-Clément Texier.

L’avenir appartient aux médias qui marient tradition et renouveau. En Suisse aussi, où Le Temps par exemple travaille à concilier le meilleur des deux mondes. A sa marque et à son savoir-faire dans le journalistique, il associe des formats et des événements qui renouvellent et diversifient le genre: longs formats, vidéos didactiques, débats et concerts en live sur les réseaux sociaux, rencontres avec le public et, bientôt, des séquences audio en podcast.

Résultat: plusieurs distinctions internationales, des abonnés et les recettes numériques en hausse et un intérêt renouvelé du public. De quoi garder le moral sans sacrifier à la morale, soit à la qualité éditoriale. C’est aussi ce à quoi travaille le CFJM, qui permet aux journalistes confirmés de se confronter aux nouveaux formats et aux nouveaux narrateurs de se former au journalisme. Et ce, quel que soit le parcours suivi en amont, sans autre exigence que de travailler pour les médias.

Votre commentaire

Veuillez remplir tous les champs.
Votre adresse e-mail n'est pas publiée.

* = obligatoire

Code de vérification *